IL CONTORNO DI UN CORPO NON E IL LIMITE, 5.7. – 18.8.2024
Vernissage
Ve, 5.7.2024, 18:00
Exposition en vitrine
(pas d'heures d'ouverture)
La peau représente la limite du corps humain.
C’est notre organe le plus lourd et le plus étendu, celui qui se pose comme une cloison épaisse, entre soi et le monde. La peau sert autant de frontière que de seuil. Une porte entrouverte, où s’infiltre des corps étrangers, où viennent toquer des choses que l’on pensait avoir enfoui : le rouge aux joues, une réaction de stress. C’est une ardoise de la mémoire, où s’inscrit un bleu, une cicatrice, des souvenirs d’évènements marquants.
Il y a l’épiderme, le derme, l’hypoderme. Il y a des couches de peau, de cellules, des couches d’histoires. En nous, nous portons constamment des cellules plus anciennes, celles de nos grands-parents, des singes préhumains, des atomes de carbone millénaires. Notre corps contient en tout temps des histoires qui nous débordent. Nous sommes
le résultat d’une sédimentation lente, d’un mélange de matières et d’époques, plutôt que d’un contour clair et net qui viendrait nous extraire du reste du monde.
Ici, on devine des bouts de corps, une surface géla- tineuse, un mouvement de tissu, le reflet de la rue ou de notre propre silhouette. L’image originale est
altérée, décalquée, fracturée par une suite de gestes impulsifs et répétitifs. En multipliant les couches, c’est une profondeur qui se crée. La vitrine est
ici la surface de la salle d’exposition, une surface qui reflète l’extérieur, tout en révélant des plaies, des blessures, créant une ouverture vers le viscéral.
Depuis la rue, on plonge au fond, vers ce qui grouille, on s’enfonce entre les strates, vers des formes que l’on ne sait pas nommer, des couleurs que l’on n’avait jamais vues. Si la peau est cette surface poreuse, c’est aussi un lieu d’échange. C’est par elle que l’on perçoit les températures, la douleur, les doigts fripés par l’eau du bain, les microbiotes de bactéries. Le corps représenté ici est fragmenté, peut-être abimé, mais chaque fragment entre en résonnance avec les autres, les matières se répondent, se contiennent et se reflètent, donnant à voir une chair élargie, envahie. C’est une peau écorchée mais une peau vivante, hybride, qui vibre de tout ce qui la traverse, des contaminations à laquelle elle s’expose.
Texte par Ella Stürzenhofecker